Si Camaret-sur-Mer doit sa renommée à son fameux curé, la petite ville du Finistère mérite qu’on aille au-delà de sa chantonnante notoriété populaire. Située au bout du bout de la pointe de la presqu’île de Crozon, cette cité de pêcheurs a gardé son authenticité avec son port et ses falaises escarpées. C’est au cours d’un road trip en Bretagne que j’y ai fait une escale d’une journée, en découvrant également les environs avec les pointes de Pen-Hir et des Espagnols.
La presqu’île de Crozon
Après la pointe du Raz et celle du Van, direction la presqu’île de Crozon où le ciel se dégage petit à petit, révélant un paysage champêtre et vallonné. Finalement, c’est plus long que ce que j’imaginais mais la route est relativement agréable, d’autant plus avec la lumière de fin de journée qui colore les reliefs. Plus nous roulons, plus nous avons l’impression d’un micro-bout du monde. Mais la presqu’île de Crozon, entourée du Parc naturel marin d’Iroise avec la rade de Brest au nord et la baie de Douarnenez au sud, vaut qu’on s’enfonce à son extrémité, en forme de croix, avec des falaises abruptes, ses criques sauvages et ses authentiques villages de pêcheurs. Si visiter Camaret-sur-Mer en un jour est suffisant (avec une balade sur la pointe de Pen-Hir), on pourra aussi profiter des plages de sable et découvrir le cap de la Chèvre et la pointe de Dinan, la presqu’île de Roscanvel et la pointe des Espagnols, l’aber de Crozon ainsi que l’abbaye Saint-Guénolé de Landévennec.
Visiter Camaret-sur-Mer et ses environs
Un village de pêcheurs
Après la descente avec vue plongeante sur le port, nous arrivons en fin de journée à Camaret-sur-Mer et nous garons sur le parking de la digue. Le ciel, à la faveur d’un vent soutenu, s’éclaircit et laisse place à un coucher de soleil doré d’un côté et rose au-dessus du port. Au son de leurs cliquetis, les bateaux dansent sur la scène violacée ondoyante. Car les Camarétois ont trouvé ici un havre, dans une anse orientée est, à l’abri des vagues de l’océan. Le front du port ressemble à celui de Cancale avec une ligne de maisons en pierre et ses terrasses de cafés et restaurants couronnant une haute digue.
Témoins de l’époque fastueuse de la pêche crozonnaise, le cimetière des bateaux expose sept épaves à quai portant les stigmates du temps (chronos et météo). Au delà du folklore du fétiche ou du totem, elles font perdurer l’histoire de Camaret-sur-Mer et son lien intrinsèque avec la pêche (à la langouste notamment). On s’imagine alors sur ces navires, au milieu des tempêtes, et la hardiesse nécessaire à cette vie de marin.
© L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷
En arrière-plan, dans la perspective de la digue, dite Le Sillon, la chapelle Notre-Dame-de-Rocamadour, bâtie en 1527 (Roc’h a ma dour signifiant en breton « rocher au milieu de l’eau »). De l’extérieur, sa façade triangulaire (comme on en retrouve beaucoup en Bretagne) est épurée et son clocher a été étêté par un tir de canon anglais en 1694, lors de la bataille de Camaret. Suite à un incendie en 1910, il ne reste de l’intérieur qu’une architecture simple avec des maquettes de navire suspendues au plafond et dans des vitrines ainsi que des ex-voto pour prier les matelots en mer.
Et tout au bout, érigée en 1693-1696, pointe la tour Vauban, du nom du grand architecte militaire français qui en donna le plan de construction (aussi appelée « tour Dorée », du fait de la couleur orangée de son crépi à base de sable de la grève, de chaux et de briques pilées issus du port de Camaret-sur-Mer. Haute de 18 mètres avec quatre niveaux et équipée d’une batterie basse à canons, elle avait pour fonction de surveiller l’entrée dans l’anse de Camaret. On peut la visiter (3 à 6€) mais, personnellement, nous n’avons pas jugé très intéressant de le faire.
Nous irons également nous balader à l’est, sur le sentier côtier au-dessus de la zone portuaire du quai Louis Auguste Tephany. Nous croiserons toutefois quelques randonneurs, traileurs et promeneurs de chien. Malheureusement, pas de belvédère réellement aménagé pour profiter de la vue dominante sur Camaret (mais aussi les hangars…) et nous ferons rapidement demi-tour sans continuer jusqu’à l’anticlinal dit de la « Mort anglaise », la pointe Sainte-Barbe, la grotte du Bernard… Ensuite, visite de Camaret-sur-Mer même où nous avons circulé dans les petites ruelles décorées du bourg, en arrière-plan du port, assez désertes ; on observe toutefois quelques boutiques et galeries d’art.
Puis, en remontant depuis la place Saint-Thomas, nous découvrons, par hasard, l’église Saint-Rémi, construite en 1931. Calfeutrée derrière des échafaudages et des barrières (pour cause de restauration car très abimée), elle ne paie pas de mine de l’extérieur avec un toit en ardoise et des murs en grès et en granite de Locronan sur lesquels sont sculptés en bas-relief plusieurs motifs marins (le curé de Camaret l’abbé Bossenec, son commanditaire, voulait qu’elle soit l’« église des pêcheurs », pécheurs). Cependant, l’intérieur est séduisant avec de petites fenêtres décorées de vitraux polychromes très lumineux (parfois abstraits, avec beaucoup de jaune et de violet). Ils infusent au volume une ambiance très particulière, très douce.
En poursuivant à l’ouest, dans l’idée de rejoindre la pointe de Pen-Hir (voir plus bas), nous passons à côté des alignements de Lagatjar. Mais, très honnêtement, après avoir vu ceux de Carnac, ils apparaissent ici presque anecdotiques. Juste derrière, sur les hauteurs de la plage de Pen-Hat, les ruines du « manoir du Boultous » (ou « manoir de Coecilian ») du poète Symboliste/pré-Surréaliste Saint-Pol-Roux. Après le drame qui s’y est déroulé durant la Seconde Guerre Mondiale puis la mort de Pierre Paul Roux (il a été enterré au cimetière de Camaret), les bombardements alliés ont mis à feu la villa bourgeoise dont il ne reste aujourd’hui que quelques tours et murs.
les alignements de Lagatjar
les ruines du manoir du Boultous
Le sentier du littoral
En partant depuis le port de Camaret-sur-Mer, un chemin côtier, sur lequel passe l’itinéraire du sentier des douaniers (GR34), monte la falaise au-dessus de la plage de Corréjou pour ensuite longer le bord de mer sur les hauteurs. En quelques minutes, on atteint le fort du Petit Gouin, un corps de garde construit en 1859 pour assurer la protection de l’anse de Camaret-sur-Mer. L’accès à l’intérieur est libre mais ne présente pas d’intérêt particulier sinon un point de vue un peu plus surélevé que le sentier. Juste en-dessous, un ancien casernement allemand.
la plage de Corréjou de Camaret-sur-Mer
Suivant la côte effilochée de la pointe du Grand Gouin, on passe alors devant/dessus/dedans un ancien blockhaus de la Seconde Guerre Mondiale, encastré dans le terrain herbeux, et qui comportait quatre canons (en regardant sur Google Map en vue aérienne, on aperçoit encore autour de lui les impacts d’obus). Le sentier du littoral, tracé dans un parterre multicolore de bruyères (pour des raisons de préservation de la végétation mais aussi de sécurité géologique, il ne faut pas s’en écarter), surplombe les imposantes et superbes falaises. Au fil des pas (une paire de chaussures de course/trail est suffisante), le promontoire offre de nombreux points de vue où se révèlent les rochers de Porz Naye puis le chaos de la plage de Porzh Korven.
les rochers de Porz Naye
la pointe du Toulinguet
On atteint enfin la pointe du Toulinguet avec sa fortification, son sémaphore et ses batteries défensives du XIXe siècle (inaccessible car il s’agit d’un terrain militaire). En contrebas, la magnifique grande plage de Pen-Hat, recouverte de sable blanc, hyper venteuse et agitée, d’ailleurs interdite à la baignade à cause de la présence de baïnes. Émergeant en arrière-plan, le rocher du Lion (c’est qu’il ressemble !). Avec son parking, nous nous disons que, si nous l’avions su avant, nous serions venus poser la voiture ici pour dormir car c’est assurément un splendide spot de road trip avec coucher de soleil sur l’océan (quoique venteux !!!). On peut poursuivre le sentier du littoral jusqu’à la pointe de Pen-Hir (environ 6,5 km depuis le port de Camaret).
la plage de Pen-Hat avec, en arrière plan, la pointe de Pen-Hir © L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷
La Pointe de Pen-Hir
Si vous vous demandez que faire à Camaret-sur-Mer mis à part la visite du village, la pointe de Pen-Hir est l’incontournable à voir dans les alentours, à 3,5 km au sud du port. D’ailleurs, victime de son succès, l’accès en voiture est plutôt compliqué avec une unique petite route y conduisant où il est difficile de se croiser puisque, les parkings saturés, les gens se garent sur les bas-côtés (si vous pouvez donc, privilégiez le vélo pour vous y rendre, ou la marche, via le sentier du littoral). Heureusement, le relief étant finalement assez grand, les gens se dispersent petit à petit et on ne subit pas trop la foule. Côté est, dans une anse, la charmante plage de Veryac’h, à l’abri du vent d’ouest par le relief et ceinte de falaises ocre rouge. Au centre, se dresse la croix de Pen-Hir, un immense monument aux Bretons de la France libre pendant la Seconde Guerre mondiale, construit entre 1949 et 1951. Petit conseil entre amis : pensez absolument à avoir une veste coupe-vent (et imperméable) !
l’anse de Pen-Hir
la croix de Pen-Hir
Au-dessus des falaises tailladées de plus ou moins 65 mètres, la pittoresque balade sur la pointe de Pen-Hir offre de nombreuses vues où chaque crique révèle son propre paysage, où les vagues viennent se fracasser sur les rochers en contrebas. On croise également plusieurs grimpeurs sortant des multiples voies d’escalade de Pen-Hir (130 ! cotées de 3c à 8a). En fait, au fur et à mesure qu’on observe les parois, on s’aperçoit que ça fourmille de partout ! On se croirait dans les calanques de Cassis (les pins et les cigales en moins…). Si ça vous tente donc de goûter au grès armoricain, n’oubliez pas d’emporter votre baudrier et vos chaussons dans votre valise de vacances.
Tout au bout de la pointe de Pen-Hir (« longue pointe », en breton), le monticule se termine en pointillés avec les rochers émergents des Tas des Pois, respectivement nommés Grand Dahouët et Petit Dahouët, Penn-Glaz, Chelott, Ar Forc’h et Bern Id. Et, au loin, on peut apercevoir la célèbre pointe du Raz ainsi que, moins connue mais non moins intéressante, la pointe du Van, toutes deux parcourues la veille.
les Tas des Pois de la pointe de Pen-Hir © L’Oeil d’Édouard / Instagram 📷
La Pointe des Espagnols
En épilogue de notre visite de Camaret-sur-Mer et ses alentours, nous terminons notre journée en poursuivant au nord de la presqu’île de Crozon, et plus précisément de celle de Roscanvel, à la pointe des Espagnols, à 11 km au nord. Idéalement placée pour protéger l’entrée du goulet, celle-ci doit son nom au siège du fort Crozon de 1594, alors occupée par des soldats ibériques. Le promontoire a été fortifié par Vauban en 1695 puis sous Napoléon 1er avec différentes batteries et, témoignant de son histoire, un énorme canon est encore exposé “en situation”.
Il est vrai que la pointe des Espagnols est un mirador stratégique, disposant d’une large vue panoramique à 270° sur la rade de Brest, ressemblant quelque peu au paysage de Toulon. Néanmoins, en plus d’un vent à décorner un bœuf et après avoir vu de nombreuses pointes bretonnes lors de mon road trip de 15 jours, je vous avoue une certaine déception. Ici, rien de sauvage et vue sur le port brestois avec ses cargos, ses hangars et ses bâtiments militaires dont une base sous-marine me rappelant celle de Bordeaux (où se trouvent dorénavant les somptueux Bassins des Lumières vus quelques jours avant). Bref, après 1/4h sur place, nous reprenons vite la route pour Trégastel et la côte de Granit rose.
la rade de Brest, depuis la pointe des Espagnols
Infos pratiques : mes conseils & avis
Où manger des fruits de mer : on a testé
En déambulant pour faire un peu de shopping dans la zone des hangars du quai Louis Auguste Tephany, derrière l’office de tourisme de Camaret-sur-Mer, nous avons trouvé Les Viviers de la pêche Camarétoise où nous avons mangé 6 huîtres et des crevettes (9€ + 9€) sur la terrasse. À l’intérieur, des bacs avec des crustacés et, en vente, d’autres produits de la mer, selon arrivage. Malheureusement, l’établissement a fermé en décembre 2023. Si vous êtes féru de poissons et de fruits de mer, le Lonely Planet conseille Le Styvel avec vue sur le port. Pour connaître les meilleurs restaurants à Camaret-sur-Mer, je vous renvoie sur TripAdvisor.
Ps : petit bonus fantaisie d’activité à faire, avec des enfants notamment, Sarah anime des ateliers cuisine d’algues avec une balade sur une plage de Camaret-sur-Mer pour récolter les ingrédients marins suivie d’un cours de préparation.
Visiter Camaret-sur-Mer en 2 jours : où dormir sur la pointe de Crozon ?
Pour vous donner un ordre d’idée de combien de temps pour visiter Camaret-sur-Mer, un jour est largement suffisant (voire seulement une demi-journée pour uniquement la ville même). Mais si vous voulez ne pas vous presser sur les chemins et pouvoir assister au coucher du soleil, il peut être profitable de passer une nuit sur place. Petite ville de 2500 habitants, Camaret-sur-Mer dispose de quelques hôtels et de nombreuses locations (maisons, appartements, gîtes, etc.). Parmi eux, l’hôtel de France, idéalement situé sur le port, ou encore le Thalassa Hôtel & Spa. Vous pouvez également regarder les hébergements sur Crozon (à moins de 10 km) et autres locations de vacances.